Les polluants éternels constituent une catégorie de molécules qui comprend les polyfluoroalkylés et perfluoroalkylés (aussi appelés PFAS). Ces composés sont utilisés depuis le milieu des années 1950, et réputés pour être très difficilement dégradables, car leur demi-vie est très longue.
Ces composés sont utilisés dans divers domaines, tels que les cosmétiques, les gaz réfrigérants, mais aussi dans le textile pour ajouter une couche hydrophobe ou oléophobe sur certains tissus appliqués. C’est le cas dans le domaine de l’ameublement par exemple.
Récemment, un amendement a été présenté par des députés et voté afin d’interdire ces composés chimiques à l’horizon 2030. Après une réclamation de la part du groupe SEB, qui utilise les PFAS dans les revêtements anti-adhésifs des poêles, d’autres industries concernées se posent la question de l’efficacité de cette mesure, et de ses conséquences.
En effet, si les polluants éternels sont supprimés, les industries concernées seront amenées à revoir
leurs formules. Concernant le textile, Witex a consulté plusieurs acteurs de la filière afin d’avoir leur avis sur la question : quelle importance ont les PFAS dans leur activité, et en quoi les interdire va perturber cette dernière ?
La chimie des polluants éternels tourne autour des résines fluorées, où certaines formulations ont
dû être ajustées pour les résines anti-taches. Ceci aura un impact sur les propriétés des textiles concernés. Reconnaissant la pollution de l’eau causée par les PFAS, l’industrie a depuis plusieurs années adopté une stratégie de substitution : passer des produits de la catégorie C8 à la catégorie C6 puis la catégorie C0 (non polluante) afin d’anticiper cette mesure, comme nous l’indique Christophe Kiefer des établissements Parmentelat. Les consommateurs doivent comprendre que ces alternatives sont plus coûteuses (jusqu’à +30%), et que les tissus perdront désormais leur résistance aux substances grasses, ce qui affectera des articles spécifiques de leur gamme.
L’autre priorité de l’industrie textile européenne est de veiller à ce que les produits importés respectent la même législation comme l’indique Séverine Crouvezier, présidente des établissements Crouvezier Développement et co-présidente du Syndicat Textile de l’Est. Dans le cas contraire le textile européen souffrirait d’une concurrence déloyale.
En outre, tous les acteurs n’utilisent pas de polluants éternels dans leurs processus de production, c’est le cas de Toiltech (groupe LVMH), comme l’a indiqué son PDG Philippe Vandevoir. Le groupe LVMH a cependant mis en place des procédures pour s’assurer que les tissus qui leur sont livrés sont également exempts de ces polluants. C’est crucial, compte tenu de l’interdiction concrète sur le marché
nord-américain à partir du début de 2025, où le groupe possède des installations de production.
Dans son ensemble, les avis récoltés convergent, et une tendance se dégage : les PFAS et autres polluants éternels sont une réelle préoccupation pour la filière européenne, comme l’ensemble des problématiques environnementales.
Mais les Etats et l’Union Européenne doivent s’assurer de l’interdiction d’entrée sur le territoire des produits non conformes pour accompagner son industrie textile, partenaire de secteurs économiques essentiels pour la souveraineté de l’Union.